GiG – James Lovegrove

[rating=5]

GiG

Auteur: James Lovegrove

(traduction de Mélanie Fazi)
Griffes D’Encre, 2009

(2004 pour la version originale)
360 pages, 20 euros
ISBN: 978-2-917718-10-0

Mik Dyer est le leader charismatique du groupe God Dog. Richissime rockstar, il revient à Rotor City, la ville où il est né et où il a grandi, pour y faire un concert mémorable. À peine arrivé, Mik annonce la dissolution du groupe et adopte un comportement étrange que même Dave Noon, son ami d’enfance, n’arrive pas à comprendre.
Kim Reid est une fan inconditionnelle de God Dog au point de se travestir trait pour trait en Mik Dyer. Prête à tout pour acquérir le pass « full access » qui lui permettra d’assister au concert de son idole, elle semble mue par un projet plus ambitieux et plus terrible.
Deux personnages, deux faces d’une même histoire déclinée en deux novella aux structures étrangement similaires.

http://ipsevenenabibas.files.wordpress.com/2009/05/gig-kim.jpgCurieux ouvrage que celui-ci, à tous points de vue. L’objet « livre » tout d’abord : au lieu des tradition elles couverture et quatrième de couverture, il présente deux couvertures, à l’envers l’une de l’autre. Une moitié du livre comprend la novella « Mik » et l’autre celle « Kim », laquelle est imprimée dans le sens inverse de la précédente, si bien qu’on ne sait pas dans quel sens le prendre. Cette « double couverture » aussi étrange que novatrice reflète la structure même des textes : chaque novella comprend 11 chapitres dont les titres sont les anacycles les uns des autres (pour faire  clair, lisez le titre 1 de « Kim » à l’envers et vous aurez le titre 1 de celle « Mik » et ainsi de suite pour tous les autres). Le texte renferme d’ailleurs d’une foule d’anacycles et de palindromes (les noms de plusieurs personnages ou ceux des quartiers de Rotor City pour ne citer qu’eux). Au fur et à mesure de la lecture, on en vient à s’arrêter sur chaque nom propre pour y chercher une astuce quelconque et on trouve souvent quelque chose (j’ai beaucoup aimé l’eau minérale « Naive » qui n’est autre qu’Evian à l’envers par exemple). La trame narrative reprend le même type de schéma : « Kim » et « Mik » présente des points communs mais présentés en ordre inverse dans chaque texte.
Au delà de la structure, les personnages focus des textes sont comme les deux faces d’un seul.
Vous allez me dire que tout cela est fort bien pensé sur le plan de la forme, mais le fonds tient-il la route ? Je vous répondrai oui, sans hésitation. Non seulement la structure du bouquin est extrêmement élaborée (et cela est formidablement rendu par la traduction de Mélanie Fazi qui s’est visiblement donnée beaucoup de mal pour la restituer en Français) mais Lovegrove réussit l’impossible : nous surprendre avec le second texte tout en connaissant l’épilogue qui est commun aux deux novella.
Pour le reste, Lovegrove traite des thèmes de la notoriété et de l’adulation, mais sans tomber dans les clichés du genre. On trouve aussi quelques scènes typiquement « lovegrovienne » (si vous me permettez ce subtil néologisme) comme une bagarre mémorable entre des fans des Beatles « Première Époque » (costumes strictes et coupe au bol) avec d’autres Beatlemaniaques « Seconde Époque » (cheveux longs et chemises bariolées).
Reste une question cependant : par où commencer ? Mik ou Kim ? Kim ou Mik ? Le livre ne donne aucun indice (il y a d’ailleurs une préface dans chaque sens de lecture). A priori, c’est comme vous voulez. Un faisceau convergent d’avis tendrait à prouver que les deux sont possibles, sans gâcher le plaisir de l’autre texte pour autant.
En conclusion, je vous recommande donc l’acquisition de cet « ovni livresque » (je n’ose parler d’olni parce que même moi je n’adhère pas à mon propre néologisme) à lire et relire dans tous les sens possibles et imaginables (en gros, deux sens possibles, je sais de quoi je parle, j’ai vérifié) autant pour profiter de l’histoire que de la structure extraordinairement bien fichue et innovante de l’ensemble.

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Publié dans Polar - Thriller, Recueils | Permalien |

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